Une Ferrari. Un nom qui résonne, qui vibre, et qui incarne la passion automobile. Un nom souvent associé à la quintessence de la voiture sportive, un symbole d’exclusivité, de rêve, et d’inaccessibilité, même pour de nombreux chroniqueurs automobiles comme moi. Et pourtant, au beau milieu de l’été, ma mère m’annonce qu’elle a un contact prêt à collaborer avec moi et à m’offrir l’opportunité unique d’essayer l’un de ces rares étalons.
Vous l’avez sûrement remarqué, à travers mes quelques publications sur la page On Roule au Lac, je suis un passionné de voitures de sport et de performance. Comme beaucoup de chroniqueurs, j’aime ces bolides, mais, demandez à n’importe qui de mon entourage, pour moi, c’est presque maladif. Je peux vous sortir un fait, une anecdote ou une caractéristique sur n’importe quelle voiture de sport comme ça, de mémoire : ces voitures sont ma plus grande passion. Bref, je suis un puriste.
Revenons à notre cheval cabré. Ma mère me donne les coordonnées du propriétaire (qui restera anonyme pour ces articles), je le contacte, et nous convenons d’une date. Jusqu’à ce jour, mon expérience la plus proche de la conduite d’un bolide de cette marque légendaire était de m’asseoir dans le siège conducteur d’une Ferrari 456M et de manipuler son fameux levier de vitesse guidé.
Pas n’importe quelle Ferrari à mes yeux
La Ferrari en question est un modèle qui m’a particulièrement marqué dans ma jeunesse et qui fut, pendant un moment (peut-être deux mois, je changeais toujours d’idée), ma voiture de rêve : la Ferrari 360 Modena. Ce modèle remplaçait la magnifique Ferrari 355 et avait pour mission de hisser Ferrari bien au-dessus de ses concurrentes, de plus en plus féroces. Une ligne simple et élégante, un châssis en aluminium, un V8 atmosphérique de 3,6 litres développant 400 chevaux, le tout accompagné de l’ère Schumacher en Formule 1. La 360 Modena devint l’un des modèles les plus vendus de la marque, avec un peu plus de 16 000 exemplaires écoulés entre 1999 et 2005.
De mon côté, je suis fébrile à l’idée de conduire cette voiture, cette pièce d’histoire qui a marqué petits et grands, à travers émissions, films et jeux vidéo de l’époque. Elle représentait la ligne directrice des voitures exotiques, la voiture à battre. Je ne pouvais m’empêcher de penser à ce jour fatidique qui approchait, où je pourrais enfin poser les mains sur cette voiture tant convoitée. J’écoutais des vidéos mettant en valeur le son de son V8 pour me préparer, et tout à coup, une phrase me revient en tête :
Ne rencontre pas tes héros
Cette phrase hante les puristes de conduite. Elle a pris tout son sens à plusieurs reprises dans ma vie. Ne rencontre pas tes héros. Dans le monde de l’automobile, cela signifie qu’il vaut mieux ne pas essayer ses voitures de rêve, sous peine d’être déçu. C’est alors que le fantôme d’une expérience passée est revenu me hanter : la Lamborghini Gallardo LP560-4.
Certains lisent cela et doivent penser que je suis tombé sur la tête, mais j’ai eu la chance, par le passé, d’essayer une Lamborghini Gallardo LP560-4 sur le circuit Mécaglisse. Étonnamment, cette voiture m’avait déçu. Le moteur et le châssis étaient excitants, mais elle manquait terriblement de ressenti. On avait l’impression de conduire une bête emprisonnée dans une cage... germanique. Et cette voiture, à sa sortie, n’avait qu’un seul objectif : battre la 360 Modena.
Mais à quoi m’attendre alors?
Nous sommes la veille du jour fatidique, et une partie de moi est excitée comme un enfant, tandis que l’autre est inquiète. Avant de m’endormir, je dresse une liste de mes attentes pour cette voiture, basée sur mes connaissances. Je m’attends à une direction légère, en raison du poids principalement réparti à l’arrière. Je m’attends aussi à une direction communicative, puisque celle-ci est hydraulique. Là où j’ai des doutes, c’est au niveau de la suspension. Sera-t-elle ferme ou souple ? Vais-je sentir chaque irrégularité de la route ou bien elle saura me pardonner ? Côté moteur, je m’attends à une puissance qui se révèle surtout à haut régime, avec peu de répondant à bas régime, donc un moteur capricieux au quotidien. Enfin, la transmission. J’ignore encore si elle sera manuelle ou robotisée (F1). Si elle est manuelle, je m’attends à un levier léger mais d’une précision accrue. Si c’est une F1, et ayant déjà eu quelques expériences avec ce type de transmission, je m’attends à une possible déception.
Je me couche, mais je dors très peu. Je sais que demain sera une journée extrêmement importante sur le plan personnel, et malgré mes craintes, j’ai juste terriblement hâte.
Jour J… plutôt F
Je pars à la rencontre du propriétaire de la voiture. Étant également propriétaire d’une entreprise locale, il ne pourra être présent, et c’est donc son fils qui m’accompagnera. Nous discutons de ma passion pour l’automobile et des péripéties que ce hobby implique. Il me parle également de sa propre passion pour l’automobile et la course, un hobby qu’il pratiquait jusqu’à tout récemment. Puis il me dit : “Mon fils va t’amener à la voiture, il va te montrer comment ça fonctionne et tu pourras partir l’essayer.” Pour un chroniqueur automobile, ce sont les plus belles journées de tournage.
Je rencontre alors le fils du propriétaire, un jeune homme d’une vingtaine d’années, très mature. Je lui demande évidemment s’il a la chance de la conduire de temps en temps. Il me répond que oui, son père lui fait confiance et qu’il aime beaucoup partager ce bolide. Bref, les vrais passionnés partagent toujours leur passion.
Voici le moment tant attendu. Je suis devant la porte du garage, qui s’ouvre lentement, trop lentement à mon goût. C’est alors que je l’aperçois : une rutilante Ferrari 360 Modena rouge avec un intérieur beige (classique). Tous mes souvenirs d’enfance reviennent, même si je ne l’ai jamais conduite ni même embarqué dedans. Need for Speed, Forza Motorsport, la scène d’ouverture de Rapide et dangereux 2 où Brian fait la course contre une 360 Spider avec sa Nissan Skyline R34… tout défile dans ma tête. Le fils du propriétaire me fait faire un tour, m’explique le fonctionnement de la boîte de vitesses F1 et, finalement, me laisse le volant.
Je suis terriblement excité et anxieux à la fois. Je m’assois derrière le volant, j’ajuste le siège et les rétroviseurs. Puis j’enclenche la palette de droite, et la première vitesse s’enclenche. La question maintenant : vais-je être déçu ou vais-je vivre une révélation ? Vous le saurez dans la deuxième partie de cet article.
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